Mon père, dans un lit d’Hôpital, m’a raconté sa traversée de la frontière, entre l’Espagne et la France. Son émigration clandestine. Il était avec un autre Portugais, issu du même village. O Anacleto, le maçon, avec sa valise pleine d’outils. C’était l’hiver, il faisait nuit, et ils marchaient le long d’un chemin de montagne. Mon père était habillé avec un long manteau, qui l’empêchait de marcher vite. Tout à coup, les gendarmes espagnols les ont vus et ont commencé à courir à leur poursuite. Anacleto, affolé, abandonna sa valise, “com a ferramenta”. Mon père, quand il vit cela, rebroussa son chemin et alla chercher la valise de son ami. Elle était lourde et, avec la sienne, l’échappée devint plus compliquée, d’autant que son manteau le gênait. La guarda civil finit par l’attraper. Les gendarmes lui ont alors demandé qui il était et où il allait. “Je suis Portugais, je suis tailleur mais je n’ai pas de travail au village, et j’ai quatre enfants, une femme, que j’ai laissés et que je dois nourrir”. Apitoyés, les gendarmes l’ont laissé partir, avec sa valise et celle d’Anacleto. Ironie du sort, son ami fut arrêté un peu plus loin, par d’autres gendarmes. Quelques temps après, ce dernier fit à nouveau le saut, O Salto, entre le Portugal et la France, comme des centaines de milliers d’autres Portugais dans les années 60. Il pût récupérer ainsi ses outils, que mon père lui garda soigneusement.
A mon père, qui s’en est allé ici, en France, sa terre d’accueil.
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